Surpopulation carcérale : Les établissements de la région ne font exception
Le nombre de détenus en France a battu un nouveau record au mois de décembre. 72 836 personnes étaient derrière les barreaux alors qu’il n’y a que 60 698 places en France. Une surpopulation qui peut devenir problématique dans les établissements, exemple chez nous.
Son N°1 - Surpopulation carcérale : Les établissements de la région ne font exception
Laurent Leroy, secrétaire régional CGT pénitentiaire
Qu’en est-il dans la région Grand-Est ? La tendance est-elle la même ? Quelles sont les prisons qui souffrent le plus de surpopulation ?
Oui, nous sommes touchés, comme toutes les régions de France, par la surpopulation. Elle se situe essentiellement, sur ce qu’on appelle les maisons d’arrêt, donc des établissements qui reçoivent des courtes peines, et les personnes prévenues, les personnes qui n’ont pas encore été condamnées, qui sont en attente d’un jugement. Notamment Sarreguemines qui est touché, pour lequel d’ailleurs, la direction inter-régionale avait fait une demande de retenue des écrous sur l’établissement. Donc les personnes qui arrivaient, avant les fêtes, étaient prioritairement orientées sur Metz et Strasbourg, parce que la situation de Sarreguemines était préoccupante en termes de surpopulation.
Comment est la situation du côté d'Oermingen ?
Oermingen est un centre de détention. Ce sont des personnes qui ont des peines un peu plus longues, et le taux de surpopulation est moins important. Alors, malheureusement, on fait face à une surpopulation pénale importante, et de fait les autorités ont décidé, pour juguler la surpopulation des maisons d’arrêt, d’orienter certains profils sur les centres de détention. Ce qui fait, qu’à l’heure d’aujourd’hui, "malheureusement", les centres de détention, et notamment ceux de la région, approchent des taux importants également. Ce qui crée, également, des tensions au niveau de la population pénale, puisque parfois, certains profils ne sont pas toujours, même si on essaye de bien profiler les personnes qu’on va envoyer sur les centres de détention, malheureusement, les profils ne collent pas toujours parfaitement à la population qui est sur ces établissements.
Quelles problématiques recensez-vous face à cette surpopulation ?
Le problème, c’est que vous avez déjà la promiscuité. Imaginez-vous, enfermé dans une cellule. Dans un centre de détention normalement, c’est de l’enseignement individuel, on fait encore plus attention, puisque c’est des personnes qui sont là pour longtemps, donc, qui ont un certain nombre de mètres carrés. Elles sont obligées de le partager, donc, ça peut créer des tensions. Ça crée des tensions, surtout avec mes collègues, qui doivent gérer tous ces soucis. On a des problèmes aussi au niveau du travail pénitentiaire, parce que les structures qui sont, normalement, faites pour un certain nombre de personnes, et bien, elles ne peuvent pas, faire travailler plus de monde, que ce qui est prévu à la base. Ça occasionne des difficultés, au niveau de la population pénale, mais ça en génère aussi avec mes collègues. Il y a beaucoup d’agressions, je pense, ou en tout cas de conflits, entre personnels et personnes détenues, qui ne verraient peut-être pas le jour, si on n’avait pas à faire face à cette surpopulation.
La semaine dernière, le ministre de la Justice a dévoilé 60 nouvelles mesures : des embauches, des places supplémentaires ou encore la généralisation des caméras piétons pour les surveillants pénitentiaires. Est-ce que ces mesures vont dans le bon sens ?
Pour les embauches, oui, c’est très bien. Mais on fait déjà face à de grosses difficultés de recrutement. Il faut savoir que, depuis plusieurs concours, qui sont présentés par l’administration pénitentiaire, on n’arrive pas à recruter le nombre de places qui est offert, sachant qu’en plus, très souvent, il y a des gens qui commencent la scolarité et puis qui l’arrêtent. C’est un métier difficile, qu’on a du mal à rendre attractif, il ne faut pas se voiler la face, au niveau de la population et du public, on a du mal à rendre le métier attractif, et malheureusement, même si la CGT pénitentiaire se bat depuis près de 20 ans, pour obtenir notamment, la catégorie B pour les personnels de surveillance, le ministère ne veut rien entendre, alors que pour nous, il est clairement, nécessaire de revaloriser sur le plan indemnitaire et statutaire, le statut des personnels de surveillance. Nous sommes dans une situation qui va devenir très très compliquée avec le départ de toute la génération des baby-boomers, qui arrivent aux environs de la retraite. On avait fait de très gros recrutements, on appelle ça les plans 13 000, il y a de cela, quelques paires d’années. Toutes ces personnes vont partir à la retraite. On a déjà des difficultés de personnel, si on n’arrive pas à recruter et qu’en plus, ces personnes partent à la retraite, ça va devenir très très compliqué. L’annonce de places supplémentaires, c’est très bien, mais pour avoir des places supplémentaires, il faut du personnel pour les garder. Concernant les caméras piétons, ça a été expérimenté, dans quelques établissements. Le retour du personnel, c’est que, effectivement, en cas de conflit, ça a tendance à faire redescendre, un peu, la température, si on peut dire ça comme ça. Après, il ne faudrait pas que ce soit utilisé, comme ça a pu l’être, parfois avec les caméras qui sont placées dans les établissements, pour "fliquer les personnels", si vous m’accordez l’expression. Ce n’est pas le but qui doit être poursuivi, par ce genre de dispositif.