Démission des maires, un phénomène de plus en plus fréquent

Depuis 2020, 34 maires ont démissionné en Moselle. En l’espace de trois mandats municipaux au niveau national, c’est-à-dire entre 2008 et 2026, le nombre moyen de démissions de maires par an a été multiplié par 4. On en parlait ce matin dans le Grand Réveil avec notre invité.
Son N°1 - Démission des maires, un phénomène de plus en plus fréquent
Franck Klein - maire de Buhl-Lorraine et président de l’association des Maires du Pays de Sarrebourg
En entendant ces chiffres, êtes-vous surpris et pouvez-vous comprendre qu’autant de maires n’aillent pas au bout de leur mandat ?
Ces chiffres correspondent à un mouvement que l’on entend depuis quelques mandats maintenant. Alors certes, ces chiffres évoluent en augmentant ce qui est plutôt inquiétant. C’est quelque chose dont on a bien conscience au niveau des maires ainsi qu’au niveau de notre association, on en parle souvent lors de nos assemblées générales. Cependant il s’avère que sur le secteur qui relève de mon association, je n’ai pas eu le cas de démissions massives liées à des mouvements de maires désemparés ou désespérés par leur tâche. Il y a eu des démissions, mais plutôt pour des raisons de santé. Effectivement, c’est un sentiment que l’on ressent et qui correspond à une évolution de la société, mais aussi de la place des maires dans celle-ci.
Quelles sont les difficultés qui peuvent pousser à bout les maires ? Qu’est-ce qui remonte le plus souvent au sein de votre association ?
Le fait d’être un nouvel élu n’est pas simple car il faut découvrir la fonction. Lorsqu’on est un tout nouvel élu au sein d’une nouvelle équipe, on découvre finalement une nouvelle fonction encore peu connue en tout cas dans ses détails. Il n’y a pas de formation de base avant de commencer cette fonction de maire, c’est peut-être quelque chose qui manque d’ailleurs. On peut se trouver désemparé par rapport à l’immensité de la tâche, mais aussi face à la diversité des tâches à accomplir, mais il y a aussi quelque chose, et ça, je le ressens puisque je suis maire depuis 2008, c’est une évolution même en milieu rural de notre société, qui fait qu’inévitablement les administrés sont sans doute plus exigeants, davantage tournés vers eux-mêmes. C’est un mouvement que l’on ressent aussi dans les associations locales.
Une enquête menée par le centre de recherches politiques de Sciences Po explique que les tensions politiques au sein du Conseil municipal et les passations de pouvoirs anticipées et organisées sont un véritable problème. Vous en pensez quoi ? C’est le cas ou c’est tabou ?
C’est une chose dont on ne parle pas forcément, car c’est assez gênant de se retrouver en tension politique avec son propre Conseil municipal. Quand on est maire, on est souvent issu d’un Conseil municipal avec lequel on a fait campagne de la meilleure façon possible en général. On peut être un peu désemparé quand l’équipe avec laquelle on a construit quelque chose, non pas qu’elle se retourne contre vous, mais qu’elle évolue dans un autre sens que vous. Donc c’est une chose qui existe, ce sont les distensions politiques. Dans notre secteur de Sarrebourg, on ne l’a pas ressenti, certes il y a eu des cas particuliers, mais le maire n’a pas démissionné. Ces tensions existent, mais on en parle plutôt en « off » lors de réunion de maires. Ça ne fait pas partie des sujets affichés dans les ordres du jour principaux. Mais bien évidemment que ces tensions existent.
Ce sont les communes de moins de 3500 habitants qui sont particulièrement touchées. Est-ce que c’est plus difficile d’être un maire d’une petite commune ?
Oui, évidemment, on est moins nombreux au sein des structures communales, on n’a pas des services techniques ou administratifs d’un niveau tel que peuvent avoir les grandes villes. Quand un maire a la chance d’avoir des services importants sur lesquels se baser pour travailler, et puis il ne faut pas se le cacher qui servent aussi de sous-pape entre l’administré et l’élu parfois, c’est peut-être plus facile à encaisser que d’être obligé de rencontrer les problèmes en face quotidiennement, c’est quelque chose que l’on reçoit tous les jours.
Aujourd’hui, l’État a sa part de responsabilité face à ces démissions ? Que faudrait-il mettre en place pour éviter ça ? Vous parliez au début de l'entretien de formations, c'est une solution ?
Effectivement, j’en parle, car je l’ai vu suite à une prochaine discussion au Parlement d’un statut de l’élu que les maires attendent depuis très longtemps, l’association « les Maires de France » est très actif pour cela. Pour l’instant, il n’est pas prévu quand un maire est nouvellement élu qu’il y ait une session de formation par un organisme quelconque ne serait-ce que pour expliquer les trames et les modes d’actions au sein d’une commune, ça manque et c’est quelque chose qui pourrait être envisagée. Malheureusement, je ne suis pas sûr que le projet de loi en parle.