Les apiculteurs du Grand-Est confrontés aux défis de la mondialisation
par Laura Vergne
mardi 19 mars 2024 à 05:17
Des tensions émergent au sein de la communauté apicole du Grand-Est suite aux récentes déclarations d'un apiculteur concernant les difficultés rencontrées par les producteurs de miel. Alors que l'État annonce 5 millions d'euros d'aides pour le secteur apicole, un débat s'ouvre sur les véritables enjeux : conflit entre apiculteurs ou impact de la mondialisation ?
Plusieurs associations apicoles de la région Grand-Est ont été secouées par les récentes déclarations d'un apiculteur d'Ormersviller, sur les ondes de Radio Mélodie la semaine dernière. Laurent Frumholtz, a mis en lumière un problème structurel entre les apiculteurs professionnels et les apiculteurs amateurs, déclenchant ainsi une vive réaction de la part de Dominique MAREIGNER, président de la Frage, fédération regroupant ces associations.
Qu'il dise qu'il y a un problème structurel entre les apiculteurs professionnels et les apiculteurs amateurs je ne suis pas d'accord du tout.
Le rôle vital des petits producteurs dans l'écosystème économique
Le président de la Frage rejette fermement l'idée d'un conflit intrinsèque entre les deux types d'apiculteurs, soulignant plutôt les impacts de la mondialisation sur le marché du miel. Il met en lumière un aspect financier crucial : les subventions accordées par FranceAgriMer et l'Union européenne sont calculées en fonction du nombre de ruches déclarées. Ainsi, les petits producteurs déclarant moins de ruches que ce qui existe réellement sur le territoire se retrouvent à subventionner indirectement les grands producteurs. Il insiste sur le fait que les petits producteurs de miel jouent un rôle crucial dans le maintien des subventions des apiculteurs professionnels, malgré les apparences.
Une concurrence déloyale exercée par les miels importés
Pour le président de la Frage, les 5 millions d'euros d'aides proposées par l'État ne vont pas régler le problème de fond.
Les 5 millions d'euros donnés par l'Etat, effectivement, ça peut être un coup de pouce pour les apiculteurs professionnels qui n'arrivent pas à écluser leur miel, cependant ce n'est pas ça qui va régler le problème. On va juste les aider à ne pas fermer leurs boutiques.
Le vrai problème pour Dominique Mareigner c'est une réalité économique alarmante : la concurrence déloyale exercée par les miels importés à des prix dérisoires, principalement en provenance de pays où les coûts de production sont bien moindres. Cette situation met en péril la viabilité économique des apiculteurs professionnels locaux, contraints de vendre leur miel à des prix trop bas pour garantir leur survie financière.
On a des miels qui arrivent à moins de deux euros le kilo en France et donc l’apiculteur professionnel français ne peut pas lutter contre ces prix-là. S'il vend son miel en vrac à moins de 5 euros le kilo, il ne peut pas vivre, ce n'est pas possible.
La loi Egalim, trop peu appliquée ?
Les gros distributeurs préfèrent acheter des produits à bas prix, entraînant une pression économique insoutenable sur les producteurs locaux. La loi Egalim, censée protéger les produits agricoles français en imposant des contrôles stricts sur les importations, est pointée du doigt par Dominique Mareigner comme insuffisamment appliquée.
On peut fabriquer du miel sans abeilles, du miel artificiel. De la même façon que, les Chinois savent très bien faire ça, ils rajoutent du sucre, des choses comme ça en sachant exactement à quel dosage ils peuvent le faire sans que ce soit détectable.
Il met en garde contre le risque de fraudes massives, rappelant que 46 % des miels importés en Europe sont frauduleux selon les chiffres de la commission européenne.