Épisode du lundi 27 février 2023 à 09:45
Ah Dallas, son univers impitoyable, ses grattes ciels, ses derricks, ces fameuses pompes à pétrole! Nul doute que cette ville du Texas est le meilleur exemple de l’industrialisation des USA et de sa puissance énergétique depuis les années 30. Cependant, et vous avez raison de demander, quel est le point commun avec la Moselle et l’Alsace ? Eh bien, tenez-vous bien : le pétrole. Oui, l’Alsace fut, tout comme le Texas, une région pétrolière, et bien que sa production ne fut pas similaire, il faut tout de même souligner l’importance qu’eut cette dernière pour l’industrie française et la région. Mais pourquoi donc trouvons-nous du pétrole dans l’Est de la France ?
Les couches sédimentaires de Pechelbronn se sont déposées il y a environ 45 millions d’années par la décomposition d’organismes vivants provenant de la mer qui s’étendait alors sur la plaine d’Alsace. Sa concentration est particulièrement haute dans une région d’une trentaine de kilomètres carrés entre les villages de Losbann, Wittersheim et plus généralement le long de la faille rhénane de Wittersheim à Wissembourg. Ainsi, les premiers êtres vivants à profiter de cette manne alors gratuite furent alors les animaux, comme les sangliers, qui se baignaient dans les mares de pétrole brut affleurant à la surface des forêts, afin de se débarrasser de leurs parasites grâce à la texture visqueuse du pétrole.
A Pechelbronn-Merckwiller, l’aventure de l’or noir commence déjà au Moyen-Age avec les premiers glaneurs, venant récupérer les corps gras flottant dans les trous d’eau afin de graisser l’essieu de leur charrette ou préparer des onguents. Cependant, il faudra attendre 1742, pour que l’exploitation des filons prenne une tournure industrielle. En effet, la rénovation de la Marine Royale bat alors son plein et les arsenaux nécessitent une matière afin d'imperméabiliser les coques en bois des bateaux de guerre. Jusqu'en 1879, ce ne sont pas des Derrick, mais bien des mines qui sont creusées le long des filons afin d’extraire le sable bitumineux et le raffiner par lessivage à l’eau bouillante.
La production change à la fin du XIXe siècle avec l’apparition du pompage par forage, la nature du pétrole de Pechelbronn obligeant l’installation de pompes à balancier. Ainsi, les forages descendirent progressivement plus bas, donnant l’accès à des poches plus ou moins grandes, entre 300 et 1200 mètres de profondeur. En 1949, 650 pompes sont en action autour du village ! L’importance de la production conduit à la construction d’un pipeline jusqu’à la raffinerie, construite dès 1873, faisant d’elle une des plus anciennes de France.
Les années 20 et le retour à la France de l’Alsace conduisirent le site à un âge d’or où près de 3000 personnes travaillaient sur le site, une nouvelle raffinerie étant construite, tandis que l’exploitation recommençait sous forme de mines afin de pallier la baisse de rentabilité des forages. Véritables enjeux de souveraineté nationale, les mines de pétrole de Pechelbronn furent subventionnées par l’état français et c’est ici que l’Institut français du Pétrole vit le jour en 1919. La marque ANTAR devint l’emblème du site, avec ses bidons d’huile rouge vendu partout en France. Ainsi, ce sont jusqu’à 120 000 tonnes de pétrole qui furent raffinés tous les ans sur le site, provenant des quatre coins de la planète pour répondre à la consommation française.
En 1940, les Allemands revinrent suite à l’annexion et le site fut utilisé à plein régime pour l’industrie de guerre. Bombardée abondamment en août 1944 par les Américains, la raffinerie fut totalement détruite, l’époque du pétrole alsacien touchant alors à sa fin. Relancée après-guerre, la production pétrolière en Alsace perdit rapidement en rentabilité avec la découverte des gisements saoudiens. En 1962, les mines fermèrent, la raffinerie embrayant le pas en 1970, signant ainsi la fin de l’aventure du pétrole Alsacien.
Aujourd’hui, le musée du pétrole de Pechelbronn transmet la mémoire de cette épopée industrielle alsacienne, où près de 3 300 000 tonnes de brut furent extraits et exploités !
Chronique réalisée par Les Historateurs. Présenté par Antoine, avec la participation de Hamza, Pierre-Edouard, Guillaume, Nicolas G, Nicolas D, Yann et Alexis.
"Les Historateurs" sont nés en décembre 2018 de la passion de 4 personnes pour l'histoire, l'exploration et le patrimoine.
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