Sarreguemines : A bout, les médecins urgentistes démarrent une grève illimitée


par Sarah Carliez
jeudi 22 décembre 2022 à 19:33

A bout, les médecins urgentistes démarrent une grève illimitée

Depuis un mois, la surcharge de patients au service des urgences se heurte au manque d’effectif et de moyens de l’hôpital. Hier, le dispositif "Hôpital en Tension" a été déclenché pour trouver des solutions d’accueil pour les patients. Une situation impossible pour les médecins urgentistes et personnels soignants en grève depuis ce jeudi 22 décembre.

Son N°1 - A bout, les médecins urgentistes démarrent une grève illimitée

Partout en France il y a des gens qui meurent dans les couloirs, c’est juste inimaginable, on est dans une situation de crise majeure. On n’aurait jamais pensé en venir à de telles conditions d'accueil des patients. On n’a plus les moyens de soigner les gens correctement. Là on est dans le Titanic, le bateau est en train de couler. On a besoin d’un sursaut citoyen et on a besoin que les citoyens et les soignants fassent comprendre aux pouvoirs politiques que la solution n’est pas l’américanisation de la médecine.

La docteure Emmanuelle Seris est secrétaire générale de la section syndicale de l’Association des médecins bienveillants des urgences de Sarreguemines. Mais aussi déléguée syndicale pour l’association des médecins urgentistes de France. Elle met en garde contre un système de santé qui fait naufrage.

Les revendications sont toujours les mêmes, ce qui change c’est que depuis un mois nous avons globalement en France le sentiment que tous les services d’urgences sont incapables d’assumer leurs tâches. Nous n’arrivons plus à prendre en charge les gens de manière sécurisée. C’est-à-dire qu’il n’y a plus de sécurité dans aucun hôpital en France.

Les urgences en grève depuis trois ans et demi

Selon elle, en trois ans et demi de grève, aucune mesure n'a été prise par les décideurs politiques pour remédier à la situation.

Ni une augmentation de lits, ni une augmentation des effectifs, qui se traduit bien entendu par une non-attractivité des carrières. Ceux qui sont à l’heure actuelle aux manettes ne comprennent pas les problématiques de terrain. 

Avec l’arrivée de nouveaux patients à cause des épidémies de grippes et maladies hivernales, les bras manquent pour s’occuper de tous.

Nous demandons absolument des effectifs cibles : qu’on ait un objectif du nombre de soignant par patient qui soit digne, qui permette de soigner correctement les gens et qui nous permette à nous d’être en accord avec nos valeurs. Ce que nous demandons c’est une attractivité des carrières. C’est une réflexion universitaire aussi, sur le nombre de médecins formés. Les citoyens payent des impôts pour ça, ils méritent d’avoir un minimum de qualité de soin.

Saturation du service

David est un patient arrivé aux urgences dans la nuit. Il avait passé presque 10 heures dans le couloir.

J’ai l’impression d’être un animal qu’on a mis dans le couloir et puis "sois content déjà qu’on t’ait pris". Moi j’ai 60 printemps au compteur, je n’ai pas à mendier pour quelque chose que j’ai payé pendant plus de 40 ans.

Entre 20 et 30 patients par jour attendraient dans les couloirs depuis un mois selon le constat du docteur Julien Reisdorf. Il travaille aux urgences depuis 5 ans.

On a un monsieur qui est resté 48 heures dans le couloir avant d’avoir un lit à l’hôpital de Sarralbe. Un vieux monsieur qui est tombé, qui ne pouvait plus rentrer à la maison, qui avait une infection. Ça faisait deux jours qu’il était dans le couloir. 

Un sentiment affligeant partagé par le docteur Nassim Ziane Kolee, aux urgences de Sarreguemines depuis un an.

Une patiente a été prise en charge lundi au SMUR, donc en détresse respiratoire. Je n’ai pas pu l’installer dans la salle des urgences vitales puisque tous les lits sont indisponibles dans l’hôpital et parce qu’il y avait 55 patients aux urgences à ce moment-là pour trois médecins, donc elle est restée une heure et demi devant l’hôpital en détresse respiratoire. Pour améliorer les conditions de travail, il faut plus de bras. Et pour avoir plus de bras il faut mieux rémunérer l’équipe paramédicale. Je pense que la priorité ce serait déjà de pouvoir travailler avec tous nos lits puisque là on a 25% de nos lits qui sont fermés faute d’effectif paramédical. 

De gauche à droite : le docteur Julien Reisdorf et le Nassim Ziane Kolee

Selon les médecins syndicalistes, le mouvement de grève est illimité jusqu’à ce que des solutions du gouvernement soient acceptables.

Devant la tension hivernale, l'ARS Grand Est a lancé un appel aux professionnels de santé, étudiants et retraités, à venir en renfort dans les établissements de santé de la région. Les volontaires peuvent se faire connaître via la plateforme Accueil (solidarites-sante.gouv.fr). Et y indiquer leur profession et disponibilités ainsi que leurs préférences géographiques d'activité au sein de la région. 


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