Sarreguemines : Enseignants et AESH dénoncent les limites de l'inclusion à l'école


par Camille Bazin
jeudi 9 novembre 2023 à 11:33

Enseignants et AESH dénoncent les limites de l'inclusion à l'école

Le syndicat SNUDI FO a lancé en septembre une enquête sur l’inclusion scolaire en Moselle. L'idée était de mettre en avant la complexité de cette démarche dont l'objectif est de rendre accessible l'école ordinaire à tous les enfants.

Son N°1 - Enseignants et AESH dénoncent les limites de l'inclusion à l'école

Matthieu Risse - secrétaire départemental et membre du secrétariat national du Snudi FO.

Avant de parler de cette enquête, aujourd’hui est-ce qu’on sait en Moselle combien d’enfants en situation de handicap sont scolarisés et à quelle proportion dans les établissements spécialisés et dans les écoles ordinaires ?

Je ne peux pas vous donner de chiffres précis. Par contre, ce qu’on peut dire, c’est qu’il y en a dans toutes les écoles et dans tous les établissements, dits ordinaires. Il y en a de plus en plus. Puis, à l’inverse, il y en a de moins en moins dans les structures spécialisées du type IME, ITEP. Puisqu’on n’arrête pas d’enlever des places. Il faut savoir que les notifications sont distribuées par la MDPH (maison départementale du handicap). Et rencontre des situations très diverses. Je me permets juste de rappeler que ça date de la loi Montchamp de 2005. Qui prévoyait le transfert des enfants avec un handicap, des établissements spécialisés vers des établissements ordinaires. Avec un objectif qui était affiché, à l’époque, d'égalité des droits des chances des personnes handicapées. En assurant à ces personnes la compensation des conséquences de leur handicap. En fait, dans la réalité on se rend compte que ce n’était que des mesures économiques.

Aujourd’hui quelles conclusions vous tirez de votre enquête ?

Au niveau chiffre, on se rend compte qu’il y a beaucoup d’élèves non notifiés qui devraient l’être. Il y a des élèves avec la notification de cette MDPH, qui n’ont pas encore d’accompagnants, ou un accompagnant, qui très souvent, n’est pas à la hauteur de la notification de la MDPH. Au niveau des témoignages, on se rend compte que la situation sur le terrain est très souvent insupportable. Avec une nouvelle dégradation depuis la dernière rentrée. Et puis, beaucoup de collègues qui se retrouvent dans des situations de menaces, violences. Donc, du personnel en souffrance, mais aussi des élèves. Il y a un mot qui revient très souvent dans les témoignages que nous avons, c’est la maltraitance.

Quel est le problème aujourd’hui ? Il n’y a pas l’encadrement nécessaire ? Quel retour vous avez des enseignants ? y a-t-il déjà eu des accidents par exemple ?

Déjà, l’impression globale des enseignants, c’est de ne pas pouvoir faire fonctionner leur classe correctement. Déjà au niveau des apprentissages et aussi au niveau sécuritaire. Pour les AESH, il y a l’impression de faire du saupoudrage. Elles ont en charge, 7-8, élèves, qu’elles se partagent souvent sur différents sites. Elles sont quelques heures ici, quelques heures là-bas. Donc, elles ont l’impression de ne pas faire un suivi correct. Il faudrait avoir un jour le courage de dire que certains handicaps ne sont pas compatibles avec une classe ordinaire. Et le fait de vouloir inclure des élèves à tout prix, ça provoque une grande fatigue nerveuse chez le personnel. Les coups, les griffures, les morsures, ce sont des accidents quotidiens. Il y en a qui tentent de s’enfuir. Il y a 2 jours, j’ai eu une AESH au téléphone qui a enchaîné 2 arrêts maladie, après avoir reçu des coups depuis la rentrée.

Concrètement c’est quoi la bonne solution ?

Le Parlement vient d’adopter dans la nuit du 7 au 8 novembre, le projet de loi de finance. Qui met en place l’acte 2 de l’école inclusive. Qui va remplacer le système de gestion des AESH par des pass. Le grand changement là-dedans, c’est que maintenant c’est l’Education nationale qui sera chargée de déterminer les modalités d’accompagnement. Contrairement à la MDPH qui faisait jusque-là les préconisations. Et forcément, l’Education nationale le fera avec les moyens dont elle dispose. C’est-à-dire, pas grand-chose. La solution pour nous, est toujours la même. Question de moyens, c’est de développer l’enseignement spécialisé au lieu de continuer à le détruire. C’est de remettre en place des enseignants spécialisés. Et puis les moyens de travailler en petits groupes. Parce que ces élèves en situation de handicap, ils peuvent beaucoup plus facilement réussir à atteindre les objectifs dans des groupes de 5 ou 6 élèves alors qu’ils sont noyés dans des classes de 25 élèves souvent. C’est problématique. Et pour les AESH, il y a la question de statut du salaire. Un vrai statut, un vrai salaire. Une AESH, aujourd’hui, elle gagne en moyenne 800€ par mois. Donc, il y a un problème. Une vraie pénurie. On a beaucoup de mal à en trouver dans certains secteurs du département.

Enseignants et AESH se réunissent ce jeudi 9 novembre à Sarreguemines pour préparer une conférence nationale contre l’inclusion scolaire systématique. Elle aura lieu le 17 novembre à Paris.


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