Grand-Est : Les bouchers-charcutiers en danger face à l'explosion des prix de l'énergie
Les artisans bouchers-charcutiers de France manifesteront aujourd’hui devant l’Assemblée Nationale.
Son N°1 - Les bouchers-charcutiers en danger face à l'explosion des prix de l'énergie
Christian Nosal – président de la fédération des bouchers-charcutiers-traiteurs de Moselle et du Grand-Est
Depuis plusieurs mois de nombreux artisans bouchers subissent l’explosion de l’énergie, concrètement c’est quoi le problème aujourd’hui ?
Le problème est simple. Un collègue qui avait sur l’année une facture énergétique de 8000€ se retrouve aujourd’hui avec une facture de 40 000€. Deuxième exemple, un collègue qui avait une facture de 30 000€ se retrouve avec une facture de 125 000€. En fin de compte, l’énergie a été multipliée par 5, par 6, voire 7.
Ce sont des prix qui ne peuvent pas être répercutés sur la marchandise ?
C’est impossible ! Vous imaginez ? Prenons l’exemple de ce collègue qui se retrouve avec une facture d’électricité de 32 000€, ça représente une somme énorme. On ne peut pas, dans les conditions actuelles de difficultés pour la population augmenter les prix à outrance tout en sachant que la viande a déjà augmenté par un phénomène qui n’a rien à voir avec l’énergie mais l’augmentation du prix de la viande plus l’augmentation du prix de l’énergie c’est absolument impossible.
L’industrie de la viande c’est une chaîne : producteurs, abattoirs puis bouchers, vous subissez les augmentations de tous les maillons de la chaîne, ça représente combien ?
Oui en sachant que ce qui m’inquiète beaucoup aussi c’est que les éleveurs ont d’énormes difficultés. Un éleveur minimum par semaine ferme son exploitation en France. Nous les bouchers on commence à se poser des questions parce que comme nous avons souvent des circuits courts si ces gens-là disparaissent qu’est-ce qu’on va faire ?
Vous craignez des fermetures ?
Le problème c’est que nous avons déjà des collègues qui ont annoncé leur fermeture dans les semaines à venir et d’autres qui vont arriver en début d’année. Lorsque les bilans vont tomber et quand ils s’apercevront que la masse de charge devient ingérable, beaucoup ne pourront plus continuer d’exercer. Donc ça veut dire fermeture, disparition du commerce avec suppression du personnel.
C’est la première fois depuis plus de 20 ans que la profession se mobilise. Vous retrouvez dans la rue aujourd’hui c’est un message fort ?
Oui, parce qu’on ne reproche pas au gouvernement d’avoir beaucoup aidé pendant le covid en sachant que les bouchers n’ont pas bénéficié des prêts accordés parce que nous étions en activité. On était maillon essentiel. Ce qu’on reproche aujourd’hui, c’est la prise en compte réelle de ce qui se passe actuellement. Quand vous avez des pays en Europe comme le Portugal, l’Espagne ou l’Allemagne qui ont bloqué les prix du kWh, je donne un exemple l’Allemagne 130 euros, l’Espagne 200 euros et le Portugal 180 euros et nous on est à 800 euros. On ne va pas pouvoir lutter, en plus de ça la concurrence dans les zones frontalières va être compliquée, vous avez en face de chez nous des gens qui ont une électricité, un coût beaucoup plus abordable, ça va être extrêmement compliqué.
Qu’attendez-vous du gouvernement ?
Que le gouvernement se rende compte des vrais problèmes des entreprises et que ce n’est pas simplement saupoudrer quelques subsides qui n’ont aucune commune mesure. Si certains pourront bénéficier d’une aide de 120€ au kWh, les 600€ d’écart ne seront jamais absorbés. Ce qu’on veut c’est que le gouvernement se rende compte de la réelle problématique qu’on a dans les commerces de proximité et ma crainte c’est la disparition des commerces de proximité dans les campagnes, dans les bourgs et dans les villes poserait d’énormes problèmes à court terme.
Vous serez donc devant l’Assemblée Nationale de 11h à 13h, qu’attendez-vous des politiques ?
Nous allons manifester en tenue de professionnels et je pense qu’il y aura des slogans, des affiches, des pancartes. Mais vous savez les bouchers ce n’est pas par habitude qu’on fait ça, lorsque qu’on arrive à ces extrêmes, c’est que la situation va très mal. Lors de l’assemblée générale qu’il y a eu à Marseille il y a 15 jours, j’ai vu des professionnels totalement effondrés. Donc on ne peut pas laisser faire ça, on ne peut pas laisser les gens disparaître pas parce qu’ils ont mal travaillé ou mal géré mais parce qu’aujourd’hui l’énergie ça devient quelque chose d’irréalisable, on ne peut plus travailler dans ces conditions-là ! Les professionnels chez nous ont une chose à dire c’est que nous, dans notre activité, on a besoin de chambres froides qui sont consommatrices d’énergie et des machines qui consomment beaucoup. Tout est lié et on ne peut pas couper l’un ou couper l’autre. C’est impossible, les chambres froides doivent fonctionner 24h/24.