Saint-Avold : La centrale Emile Huchet repart au charbon pour cet hiver
Le ministère de la Transition énergétique a annoncé la semaine dernière que les 2 centrales à charbon de France ont obtenu l’autorisation de fonctionner plus longtemps pour éviter un black-out cet hiver. Comment s'organise la centrale Emile Huchet de Saint-Avold ? On fait le point.
Son N°1 - La centrale Emile Huchet repart au charbon pour cet hiver
Camille Jaffrelo – porte parole du groupe GazelEnergie
En janvier 2020, l’État annonçait la fermeture des centrales à charbon jugées trop polluantes. Finalement après une fermeture vous avez dû remettre les installations en route fin 2022 pour produire de l’électricité et éviter une pénurie.
Comment se sont passés ces derniers mois ? Est-ce que vous saviez que vous alliez repartir sur un hiver de production ?
C’est une énième chronique dans la prolongation de la centrale charbon et de la crise énergétique qu’on est en train de vivre. L’hiver dernier, on a produit, on a su répondre à l’ensemble des demandes du système électrique. Il y a eu une quarantaine d’alertes et on a répondu à l’ensemble d’entre elles parce que nos salariés étaient tous extrêmement mobilisés sur l’installation. Les derniers mois, les salariés sont restés mobilisés à la centrale. Il s’avère que les contrats de travail auraient dû s’arrêter en avril et la direction de l’entreprise avait décidé, en amont de la décision du gouvernement, de prolonger les contrats de travail parce que pour nous il était totalement inenvisageable de faire rentrer les gens à la maison, donc ça revient à les licencier à nouveau, pour les réembaucher jusqu’à, on ne savait pas bien quand. On a pris un risque parce que pour nous, socialement, c’était la moindre des choses que de garder nos salariés au travail à la centrale.
Qu'est-ce qu'il s'est passé pendant l'été, est-ce que vous avez continué à produire de l'électricité ?
Notre centrale était à l’arrêt, il n’y avait plus de fumée qui s’échappait de la centrale. Pour autant, ce n’est pas parce que la centrale est à l’arrêt qu’on ne travaille pas. On a fait des très lourds travaux de maintenance sur les installations. On a remis à peu près 10 millions d’euros dans l’installation. Il y avait à peu près 300 sous-traitants qui étaient en train de faire des travaux sur la tranche, le tout, contrôlé par nos salariés. Et puis, il y a eu des périodes de formations, car tous les ans nos salariés doivent s’habiliter et donc ils se sont formés, ils ont fait les travaux. Enfin, il y a une partie des équipes qui travaille sur le démantèlement, non pas de la tranche qui tourne actuellement, mais des anciennes installations. A la fin du mois de septembre, on va réussir à démanteler un certain nombre d’installations et notamment les tours aéroréfrigérantes et donc les salariés étaient aussi au travail sur ces sujets-là.
Concernant les salariés, est-ce que tout le monde est resté ? Vous avez renouvelé les contrats ?
Non seulement les salariés sont restés mais on a même fait grossir nos effectifs. L’année dernière on avait été pris au dépourvu. On avait dû réembaucher tout le monde dans des conditions très rapides. En parallèle, on cherchait des nouveaux salariés et donc on a fait venir, par exemple, des ouvriers d’une autre centrale qui a aussi fermé dans le sud, qui sont déjà formés sur l’installation et qui vont prendre les routes de la Moselle à partir du début du mois de septembre. On fait grossir progressivement les effectifs parce que certains vont bientôt partir à la retraite et donc on a besoin d’avoir des équipes qui restent disponibles et donc avec des équipes confortables.
En parallèle, vous continuez à vous engager dans une logique de décarbonation sur le site. Comment vous gérez ces deux volets ?
Pour nous, ce sont des choses qui vont de pair et on aurait aimé que ça soit fait dès le début de la décision du gouvernement. En Allemagne, quand il a été décidé de fermer les centrales à charbon on a tout de suite pensé à l’installation de nouvelles industries qui s’ouvriront en même temps que les autres vont fermer, donc les salariés vont aller tout de suite, dans les nouveaux projets. Et nous, on a un peu fait ça mais avec des calendriers forcés et aujourd’hui finalement la prolongation du charbon nous aide à avoir une transition sur le site, à la fois au niveau industriel et au niveau social qui est plus fluide. C’est-à-dire qu’on va pouvoir réembaucher tout le monde, dans les futurs projets, les former etc. Ce qui fait que les gens ne perdront pas leur boulot. On a beaucoup avancé sur l’hydrogène. On vient de lancer, en partenariat avec l’État qui nous soutient, des études beaucoup plus approfondies sur un projet hydrogène très ambitieux sur le site qui doit produire à peu près 400MW d’hydrogène pour décarboner l’industrie. Ça, ce sera plus de 200 emplois sur le site à partir de 2027. Donc c’est un projet très important. Et puis, on va implanter des batteries de stockage d’électricité, donc on va avoir le plus gros parc français de batteries installées d’une capacité d’un peu plus de 40MW qui rendront des services au système électrique. Les travaux sont en train de démarrer et ça sera mis en service dès l’année prochaine. Il y a aussi le démantèlement des installations qui sont nécessaires. Aujourd’hui, on a besoin de place sur le site, comme le charbon a été prolongé, donc on démantèle pour pouvoir installer les nouveaux projets. Le réaménagement du site est un projet à part entière qui nécessite plusieurs dizaines de millions d’euros d’investissement là aussi de l’entreprise. Tout s’agence bien et c’est même, c’est peut-être provocateur, la prolongation du charbon qui nous a même permis d’accélérer la transition sur le site parce qu’on a réinvesti nos profits sur le site de Saint-Avold.