Stiring-Wendel : Audrey Wagner s'apprête à témoigner au procès de l'attentat de Strasbourg
Le 11 décembre 2018, Chérif Chekatt, un homme de 29 ans, radicalisé, a tué en plein centre de Strasbourg et en l'espace de dix minutes cinq personnes et en a blessé grièvement onze autres. Audrey Wagner, vous étiez, ce jour-là, au marché de Noël avec votre famille. On précise que vous êtes originaire de Stiring-Wendel. On vous avait rencontré déjà l’an dernier pour parler de la sortie de votre livre. Vous allez désormais témoigner au procès.
Son N°1 - Audrey Wagner s'apprête à témoigner au procès de l'attentat de Strasbourg
Audrey Wagner – victime de l’attentat de Strasbourg
Le procès de l’attentat de Strasbourg a débuté le 29 février. Vous vous apprêter à témoigner en tant que partie civile. Il représente quoi pour vous ce procès ?
Surtout de tourner une grande page. Je pense que ce procès-là, je le dis souvent, c’est comme un enterrement lorsqu’on perd quelqu’un, ça fait partie du cheminement du deuil.
Pourquoi est-ce que vous vouliez témoigner ?
D’abord, parce que je ne suis pas une blessée physique, je suis une victime avec des dégâts psychologiques, et je voulais aussi que notre voix se fasse entendre. Quand on n’a pas de blessures physiques, c’est compliqué pour les gens de comprendre qu’on est également atteint.
Vous étiez présente à l’ouverture du procès, comment ça s’est passé ces premiers jours ?
J’y suis allée sans réfléchir, parce que je ne voulais pas que les jours d’avant soient compliqués, mais c’est vrai, qu’en arrivant devant le palais de justice, voir les accusés dans le box, émotionnellement c’était très compliqué. J’étais perdue, je me sentais comme les premiers jours après l’attentat, comme l’impression de vivre la vie de quelqu’un d’autre en fait. C’était comme irréel d’être dans cette grande salle, les accusés dans un box, tout ce qui est déployé autour de cette affaire, c’était compliqué à gérer.
Vous avez pu échanger avec d’autres personnes blessées psychologiquement ?
Oui, on se voit quelques fois par an pour les commémorations ou des réunions à la mairie de Strasbourg, donc on est toujours en contact. Et puis là, on s’est retrouvées et on était content de tous se voir, et de se soutenir. Ce sont les seules personnes qui peuvent nous comprendre et qu’il n’y a pas de jugement, même si à côté on est bien entouré.
Est-ce que vous savez ce que vous allez dire demain ?
Je vais raconter pour la première fois cette nuit, je vais raconter ma soirée au marché de Noël… C’est un peu compliqué.
Je le disais au début de l’interview, vous avez écrit un livre, SURvivante. Vous parlez de l’après, mais pas du soir-même. Au procès, vous allez devoir parler de cette soirée-là, vous l’appréhendez ?
J’essaye de ne pas y penser, même si ça me créer des nuits blanches. Le fait que je ne le raconte pas, c’est parce que c’est l’horreur. Faire souffrir des personnes autour de moi en le racontant, pour moi, ce n’est pas possible. Là, dans cette cour d’assises, je me dis c’est l’occasion ou jamais de raconter pour une fois mon histoire.
Qu’attendez-vous de ce procès ?
Pas grand-chose. Les condamnations, je ne me base pas là-dessus, parce qu’il y en a qu’un qui est là pour acte de terrorisme, donc j’attends de voir.
Avez-vous l’impression de clôturer ce chapitre de votre vie ?
Oui, alors oui, même si je pense que je vais continuer à devoir vivre avec ça. On va pouvoir avancer, sans forcément y penser tous les jours.