Des services hospitaliers et des soignants usés, une grève d'un mois est lancée par Force Ouvrière
Un préavis de grève a été déposé par le syndicat FO pour une période d’un mois à compter de ce mercredi. Il concerne l’ensemble des services hospitaliers, les personnels médicaux et non médicaux. Pour nous en parler, Didier Birig, secrétaire générale de la branche santé Force Ouvrière et infirmier en psychiatrie au CHS de Sarreguemines.
Son N°1 - Des services hospitaliers et des soignants usés, une grève d'un mois est lancée par Force Ouvrière
Pourquoi cet appel global et sur une durée d’un mois ?
Il y a deux raisons. La première, c’est que la situation le mérite. Nous avons déjà, sur l’ensemble du territoire, de très nombreux syndicats qui sont dans l’action, et qui le sont depuis des années. Il faut se souvenir que les Urgences sont en difficulté très périodique par rapport à l’activité, ceci nécessitait quelque part aujourd’hui qu’on soit dans l’action. Le deuxième élément, pour ma fédération, on voulait marquer le coup, que ce soit la gauche ou la droite au pouvoir, puisque c’est un grand élément de discussion aujourd’hui, on souhaite des réponses qui soient apportées à l’hôpital.
Aujourd’hui, lorsqu’on entend les uns et les autres, les programmes ne sont pas pareils, et surtout, on annonce pour certains des économies qui sont encore à faire à l’hôpital, et ce n’est tout simplement plus possible. Il va donc falloir à un moment avoir des réponses, puisque je le rappelle, il y a plusieurs changements de ministre de la Santé (5 ou 6 en plusieurs mois). Beaucoup de gens parlent de l’hôpital, mais ce n’est que de la « parlotte », ce n’est que des mots, alors que dans les actes, on voit que les établissements sont en très grande souffrance. Au niveau budgétaire, il y a 80% des EHPAD et des hôpitaux qui sont en déficit structurel important. On parle de plus d’un milliard sept d’argent qui manque aujourd’hui. Je pense qu’il faut maintenant passer à autre chose, qu’aux belles phrases qui permettent de se faire élire. Il faut maintenant qu’il y ait un vrai plan Marshall pour l’hôpital. Nous, nous l’attendons depuis 18 mois, depuis la Covid, et il n’est toujours pas là.
Que demandez-vous pour améliorer la situation dans les hôpitaux et les EHPAD ?
La première des choses, c’est qu’on est une discussion avec le ministère pour ouvrir des ratio soignants-soignés dans les établissements, c’est-à-dire, combien de personnel par service nous avons besoin pour pouvoir faire des soins dignes de ce nom. Une fois que ces quotas sont actés, il faut qu’on ait un grand plan d’ouverture de postes dans les écoles d’infirmières et dans les écoles d’aides-soignants, de telle manière qu’à J+3 ans, on arrive à pouvoir atteindre ces ratios. Il faut aussi que le gouvernement s’attelle à revoir Parcoursup, c’est un véritable problème puisque 30 % des gens quittent les premières années de formation. Il y a quelques années, avec les jeunes récipiendaires, il y avait un contact physique avec une commission de sélection qui permettait de voir s’il y avait des motivations pour les métiers du soin, qui je rappelle, sont des métiers professionnels. Il faut faire des actes, on n’est pas que derrière un ordinateur ou à remplir des formulaires. Il faut être au contact du malade, il faut faire des pansements, etc.
Il y a aussi le numerus clausus, par rapport aux médecins. Je crois que là, on est en train de se moquer de nous sérieusement au niveau des instances ministérielles. On nous dit qu’il n’y a plus de numerus clausus, mais un numerus clausus apertus, ça, c’est un gros mot pour nous dire quoi ? C’est qu’aujourd’hui, les ratios de médecins ont été établis par les facs dans les régions, mais, quand on met bout à bout le nombre de postes de chaque fac, on voit qu’on est à peine au-dessus de ce qu’on avait avant, et là, ce n’est tout simplement pas possible, parce qu’on se rend bien compte qu’on a une perte de 3000-3500 médecins par an aujourd’hui, ce qui est complètement aberrant, alors qu’on a de plus en plus de déserts médicaux. On est du coup fâché avec le ministère de la Santé, parce que cette orientation est une médecine à deux vitesses ou low-cost, puisqu’ils sont en train de vouloir faire des supers infirmiers qui remplaceraient les médecins avec des autorisations de prescription.
Dans votre communiqué, le service des Urgences est particulièrement cité. L’été a été compliqué au niveau national mais aussi dans notre secteur. Est-ce qu’avec la rentrée, ça devrait s’améliorer ?
Écoutez, ça reste un secteur sensible à l’hôpital. On a plusieurs établissements aujourd’hui en tension, et dès qu’ils sont en tension, on met des plans. On parle de plan blanc, d’hôpital sous tension, ça veut donc dire que par période, lors des vacances, à Noël, des phénomènes qui sont cycliques, et on n’a toujours pas de réponse adaptée, c’est-à-dire, d’avoir des effectifs suffisants pour qu’on puisse tourner et surtout des effectifs qui doivent permettre de rouvrir des lits pour qu’on arrête d’encombrer de manière importante tous les services qui existent aujourd’hui. On a encore des services aujourd’hui qui ont 20-30-40 heures d’attente avant de pouvoir sortir des urgences ou trouver un lit. On a une perte de chance pour les malades et on a des malades qui décèdent aujourd’hui aux urgences par défaut de soins. Le ministère ne communique plus aujourd’hui sur ces chiffres alors qu’en 2023, il nous avait communiqué sur le premier semestre, 150 décès suspects et il n’y avait que 22 départements qui avaient fait leur déclaration. On voit donc qu’il y a des choses qui se passent aux urgences qui ne sont pas acceptables, les personnels ne sont pas responsables. Ce sont bien les politiques et leurs orientations prises ces dernières années qui nous ont ramenés à cette situation.