20 ans après… l'affaire Karine Schaaff
à Bitche (partie.1)
22 juillet 2001 - 22 juillet 2021 : l'affaire Karine Schaaff
22 juillet 2001, l'horreur se produit à Bitche. Le vélo de l'adolescente est retrouvé endommagé sur une route de la zone industrielle. Karine devait se rendre chez une amie, mais elle n'est jamais arrivée. S'ouvre alors ce dossier qui allait faire grand bruit au niveau national. La fille d'Edith Schaaff est retrouvée seulement 11 jours après, en forêt de Mouterhouse. Son corps a été brûlé, Karine a été également violée. L'enquête a permis d'identifier le coupable : Stéphane Krauth. L'assassin est condamné en appel à 30 ans de prison dont 20 ans de sûreté.
Impossible d'oublier
Prendre la parole, même 20 ans après, ce n'est pas chose facile pour une mère qui a perdu sa fille lors d'un assassinat. Pour lui rendre hommage, Edith Schaaff nous a ouvert les portes de sa maison afin de répondre à nos questions. La gorge nouée, les souvenirs remontants... Karine est présente partout. Dans ses pensées comme sur les murs de son habitation.
Son N°1 - 20 ans après… l'affaire Karine Schaaff à Bitche (partie.1)
J'arrive à en parler parce que j'en ai peut-être beaucoup parlé aussi dès le départ, je n'ai pas gardé ça en moi, donc j'arrive à en parler pendant un certain moment... Mais la douleur, non, je ne peux pas dire qu'elle s'est vraiment atténuée. On arrive à la gérer, on arrive à la ranger dans un coin, seulement elle sait très bien, très vite revenir, très vite refaire surface, souvent aux moments des fêtes parce que c'est des moments qui sont heureux pour tout le monde et puis vous, même si vous essayez de faire quelque chose pour être bien avec les autres membres de votre famille, il y aura toujours un instant, le petit déclic qui fait que votre fille manque, elle n'est pas là...
La vie d'Edith Schaaff a été bouleversée à jamais. Une blessure profonde que peu de personnes peuvent comprendre. Son enfant a perdu la vie dans des conditions cruelles. Tout s'est arrêté le jour du drame qu'a connu et subi sa fille.
Son N°2 - 20 ans après… l'affaire Karine Schaaff à Bitche (partie.1)
Je vis, je fais beaucoup de choses, mais j'ai l'impression que je vis une vie qui n'est pas la mienne. J'ai l'impression que je m'impose une vie mais que je ne vis pas ma vie, pas ma vie que j'aurais dû vivre. D'une seconde sur l'autre, on vous enlève votre enfant, on vous massacre votre enfant, d'une seconde sur l'autre vous ressentez l'injustice... donc la vie s'arrête. Cette vie qui aurait dû être la vôtre s'arrête brusquement. Notre vie à tous s'est arrêtée avec l'enlèvement de ma fille. Après, il a fallu reconstruire une autre vie, mais cette autre vie manque de quelque chose. J'ai l'impression que ce n'est pas vraiment ma vie.
Pour vivre, ou plutôt survivre, Edith Schaaff a fait un long travail sur elle-même afin de surmonter cette douleur. Une douleur toujours présente, moins vive qu'auparavant, mais qui peut vite reprendre le dessus lorsqu'une discussion ou un événement refait surface. Deux décennies plus tard, impossible de digérer ce qui est arrivé.
Son N°3 - 20 ans après… l'affaire Karine Schaaff à Bitche (partie.1)
C'est l'incompréhension du pourquoi ma fille, pourquoi nous, pourquoi quelqu'un qui n'a jamais fait de mal à personne... La gamine n'avait jamais fait de mal à qui que ce soit, elle était aimée de tous ceux qui la connaissaient. La rage n'est plus vraiment liée sur quelqu'un parce que l'assassin j'essaye de l'évacuer complètement de mon esprit. Mais, c'est l'injustice surtout au niveau de la religion, là, l'Eglise, je la gère très très mal même si je vais encore dire deux messes par an, une pour l'anniversaire de ma fille parce qu'elle, je sais, qu'elle aimait bien prier la Vierge Marie, donc par respect pour ma fille celle-là; et puis, le 25 mai, parce que c'est la journée internationale des enfants disparus.
Une enfant aux multiples qualités
Karine avait la vie devant soi. Lycéenne, elle venait de réussir ses épreuves de français pour le baccalauréat. L'adolescente était studieuse, ouverte d'esprit et appréciée de ses ami(e)s. Une fille sans problème, chouchoutée et protégée même sur-protégée par sa mère, qui a connu des difficultés à avoir des enfants. Edith Schaaff et son mari ont eu deux enfants : Fabrice et Karine.
Son N°4 - 20 ans après… l'affaire Karine Schaaff à Bitche (partie.1)
Karine j'avais l'impression que c'était un petit bout de moi. Autant j'aime mon fils, mon fils ressemble plus à mon mari intérieurement. Alors que Karine c'était moi. Karine, je la regardais, je savais déjà si elle n'était pas contente, si elle avait une surprise pour nous... C'était différent. Vous pouvez avoir plusieurs enfants, vous les aimez tous, mais ils sont tous différents et puis, vous ne savez pas pourquoi, il y en a qui vous ressemblent plus que d'autres, c'est comme ça.
La date d'aujourd'hui est une triste occasion de se rappeler qui était Karine, d'avoir une pensée pour elle et de ne pas oublier que la vie peut-être cruelle. Mais aussi, de ressortir les bons souvenirs.
Son N°5 - 20 ans après… l'affaire Karine Schaaff à Bitche (partie.1)
Karine elle avait le coeur sur la main, elle était là pour aider, elle n'avait pas de méchanceté vis-à-vis de personne... Je crois que vous pouvez retrouver les camarades de ma fille, je crois que même 20 ans après, elles seront toujours là pour dire un mot gentil de Karine. Il n'y avait aucune méchanceté chez Karine. Je veux qu'on se rappelle d'elle comme elle était sur les photos, souriante, magnifique, mon petit coeur à moi. C'était ma miss, et au cimetière sur le panneau j'ai marqué "A notre miss Karine".
Ses ami(es) avaient vite pris les devants en fondant l'association "Les amis de Karine - Protégeons nos enfants". Le but de celle-ci était d'épauler sa famille dans ce drame, de ne pas l'oublier, et de sensibiliser un maximum de monde à ce type d'atrocités.
Son N°6 - 20 ans après… l'affaire Karine Schaaff à Bitche (partie.1)
En fait, l'association c'était des amis à nous, et des personnes qui connaissaient surtout bien ma fille qui ont mis ça en place. C'était surtout pour le soutien à la famille le temps des procès, pendant ces périodes-là. Après, une fois que le soutien à la famille ne paraissait plus tellemen logique, on s'est un petit peu écarté en faisant un peu de pédagogie, on a acheté des livres de prévention qu'on a distribué dans les écoles à l'époque. Et puis après, il s'est avéré que c'est moi qui me suis retrouvée présidente de l'association. En fin de compte, j'ai arrêté de demander des cotisations il y a 3-4 ans; c'est très lourd pour une mère de famille qui ait vécu le drame, d'être régulièrement confrontée avec les drames des autres personnes qui viennent vers vous quand elles se retrouvent dans le malheur.
Aujourd'hui, l'association est donc endormie mais la mémoire de Karine Schaaff est toujours là. Une journée spéciale lui sera dédiée le dimanche 1er août à Bitche. Une messe à son honneur sera célébrée dimanche matin, puis, une marche blanche sera organisée au départ du parc du Stadtweiher à 14h. Elle retracera en partie le trajet à vélo de Karine.
Jeudi prochain, vous pourrez retrouver la seconde partie de l'interview de Karine Schaaff. Nous reviendrons avec elle sur les procès, les lieux clés de l'affaire mais aussi sur ses activités qui ont découlé de cette tragédie.
La vidéo intégrale de l'interview est également à retrouver sur notre page facebook.